Nouvelle-Aquitaine Initiative pour une agriculture
Citoyenne et Territoriale

Le 16 avril avait lieu la deuxième session de la formation "Anticiper la reprise de ma ferme" organisée par le Civam 86 en présence de Brigitte Chizelle, sociologue et formatrice dans l’accompagnement d’agriculteurs sur la transmission

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Parler transmission n’est pas évident. Face à un sujet compliqué et un public évasif ou se sentant peu concerné, comment créer un moment convivial pour aborder ce sujet sans trop de pression ? Des initiatives originales fleurissent sur les territoires pour animer des temps conviviaux mobilisant cédant.e.s, porteur.se.s de projet et parfois même acteurs territoriaux. C’est le cas de la formation "anticiper la reprise de ma ferme", créée à l'initiative du GIEE Transmission du groupe Civam 86. Ce Groupement d'Intérêt Economique et Environnemental, créé en 2020 et engagé jusqu'en 2022, est né de la réflexion d'adhérent.es du Civam :

"pourquoi ne pas mener collectivement un travail sur la transmission après avoir travaillé collectivement pendant des années sur nos pratiques agricoles ?", Claude.

Dans la profession agricole, transmettre est un passage, une responsabilité, et une rencontre humaine entre deux projets de vie nouveaux pour le cédant et le(s) repreneur(s). Une quinzaine de cédant.es, tou.tes agriculteur.trices dans la Vienne, ont ainsi participé à cette deuxième session de formation. La première session a eu lieu le 6 février dernier. Elle était dédiée à la rencontre entre cédant.es et porteurs de projets sur deux fermes à transmettre. L'occasion pour les cédant.es d'apprendre à présenter leur ferme et pour les porteurs de projets de se projeter sur des fermes et/ou des productions diverses auxquelles ils n’avaient pas forcément réfléchi. La troisième et dernière session sera la suite de cette journée, animée par Brigitte Chizelle*, sociologue et formatrice dans l’accompagnement d’agriculteurs sur la transmission. Elle aura lieu le 7 mai.

"La question de la transmission est une question complexe (et non compliquée), parce qu'elle enchevêtre beaucoup d'éléments : humain, économique, patrimoine, administratif, juridique etc. ", Brigitte Chizelle

Les frontières entre patrimoine personnel, familial et capital d’exploitation sont souvent floues. Ainsi, dans le processus de transmission d’une ferme, viennent se greffer aussi bien des questions professionnelles qu’affectives, économiques ou familiales. La transmission de l’exploitation devient également souvent synonyme d’enjeu financier pour pallier le faible montant des retraites. Aussi, de nombreux.se.s cédant.e.s se sentent démuni.e.s lorsque vient le temps de réfléchir à la transmission à un.e nouvel.le agriculteur.trice, qu’il/elle soit membre de sa famille ou non.

Les expériences sur le terrain menées par nos réseaux de développement agricoles montrent que toute ferme est transmissible si l’on se donne les moyens d’essayer.

Les objectifs de cette formation sont :
• Être capable de prendre du recul, clarifier ses idées, nourrir sa réflexion et renouveler son regard
• Identifier les enjeux, valeurs et besoins quant au devenir d’une structure agricole
• Identifier les 3 phases de la transmission HCF (Hors Cadre Familial) : se préparer, rencontrer, choisir
• Créer les conditions de la réussite de la reprise

Le programme est le suivant :
• « Faire place et faire confiance » (côté cédant)
  « S’engager à œuvrer dans la durée » (côté repreneur)
• Points de vigilance pour se préparer au projet de transmission
• Outils et démarches pour avancer sur la phase « se préparer à transmettre »

La plupart sont éleveurs, proches de la retraite, et souhaitent transmettre leur ferme dont la taille oscille entre 100 et 250 hectares. Si certain.es transmettront à leurs enfants, pour la plupart il s'agit de trouver des repreneurs, parfois non issus du milieu agricole.

"La transmission occupe une place importante dans ma vie aujourd'hui. C'est beaucoup de questionnement. J'ai à cœur de pouvoir transmettre, et j'ai besoin de me projeter rapidement. La rencontre avec les porteurs de projets a été très intéressante. Je pense que notre ferme doit être restructurée pour attirer des repreneurs". Philippe

Tou.tes ont envie de transmettre. Que leur ferme parte à l'agrandissement serait pour eux un échec.

"J'ai besoin d'aide pour avoir de nouvelles perspectives et avancer dans mon projet de transmission", François.

"Vous êtes des porteurs de projet de transmission", Brigitte Chizelle est là pour les accompagner à se poser les bonnes questions, à se projeter, à lâcher prise : "vous devez vous consacrer à ce qui est sous votre contrôle et lâcher prise sur ce qui n'est pas de votre ressort. Cela vous permettra de récupérer du temps et de l'énergie pour vous consacrer uniquement sur ce qui dépend de vous".

L’incompréhension d’une partie de la profession agricole face au nouveau visage de l’agriculture est un frein. Le public des NIMA, HCF ou CF faisant évoluer le modèle agricole de leurs parents n’est toujours ni compris ni pris en compte par une grande majorité des acteurs du développement agricole, ni dans leur profil, ni dans leurs aspirations, ni dans leurs besoins. Ainsi, face à ces inquiétudes ou interrogations, Brigitte apporte des éléments pour tenter de comprendre et de s'adapter à cette nouvelle génération de paysan.nes à qui ils vont transmettre leur ferme. La Société a connu de profonde mutation ces dernières décennies et le métier de paysan a changé (statut de la femme, place de l'enfant, rapport au travail, rapport à la terre, etc.) Un projet de transmission, ça ne s’invente pas, ça se prépare. Brigitte Chizelle leur propose un véritable parcours du cédant.

Le secteur agricole est aujourd’hui confronté à un double défi : celui du renouvellement des générations et celui d’une transition agroécologique rapide et profonde. Seules des installations massives de porteurs.euses de projets proposant une vision renouvelée de l’agriculture peuvent changer la donne. De ce fait, il est nécessaire de prendre en compte les attentes de ce public et de repenser les modalités d’accompagnement encore trop souvent indexés sur un modèle devenu obsolète.

 " Je suis venu assister à cette formation par intérêt personnel mais aussi sociétale. Il faut faire quelque chose. Nous devons encourager et donner envie de devenir paysan.ne ", Raymond

*Créé au début des années 2000, l'organisme de formation Autrement dit, forme chaque année plus de 500 stagiaires en France : près de 200 chefs d’entreprise (porteurs de projet de transmission et/ou d’installation) sur les questions relatives à l’humain dans ce type de projet et une centaine de personnes sur le développement des compétences à travailler à plusieurs au sein de systèmes participatifs. Ils oeuvrent depuis près de 20 ans au service de l'Humain dans différents secteurs dont l'agriculture : études-action, sensibilisation, formations, accompagnement. Pour en savoir plus : https://www.autrement-dit.org/